jeudi 31 décembre 1998

Nouâdhibou


Nous nous levons à 7 heures 30 pour faire les démarches administratives le plus vite possible. Thomas réussit à s’ensabler bêtement sur une butte de sable dans le camping. Nous le sortons en le tirant avec un câble. Nous passons tout d’abord à la douane pour récupérer la carte grise et l’attestation de devises importées. Nous y retrouvons nos amis de voyage. Ils ont trouvé un guide pour les trois voitures. Après, nous allons chercher une assurance obligatoire pour la Mauritanie. L’attente est très longue. Pour gagner du temps, j’en profite pour aller au bureau du parc national afin d’obtenir un droit de passage obligatoire. A chaque fois, il faut payer quelque chose. Une façon efficace pour pomper un maximum de fric. Mais tout ça est officiel. Je retrouve Franck à l’assurance qui vient juste de finir. Enfin, nous allons au commissariat de police pour faire viser nos passeports. Là aussi, il faut payer. Félix préfère ne pas faire viser le sien puisque étant africain, sa carte d’identité suffit pour passer les frontières des pays membres de la Cédéao. Nous avons tout terminé les tracasseries administratives vers midi. Nous acceptons de prendre avec nous un jeune stoppeur français, Mathieu, sympa mais un peu tapeur sur les bords. Nous faisons quelques courses avant de partir. Pâtes, petits pois, bananes, pommes et du Fanta orange pour Félix. Nous partons et mangeons quelques gâteaux secs dans le camion pour ne pas perdre de temps. Nous arrivons, une vingtaine de kilomètres plus loin, au barrage de douane de la veille. Passage obligé car Nouâdhibou est une presqu’île. Les policiers demandent à vérifier les tampons des passeports. Franck, l’idiot, crie à Félix, qui est resté dans le camion, d’amener le sien. Bien entendu, les flics s’aperçoivent qu’il n’a pas de tampon puisqu’il n’avait pas donné son passeport. J’ai beau leur expliquer qu’il n’en a pas besoin, ils réclament 300 francs pour le laisser passer sans avoir à retourner à Nouâdhibou. Encore une connerie à la Félix. Les douaniers nous emmerdent aussi car le matériel destiné à la croix rouge n’a pas été déclaré à la frontière. Ils veulent donc qu’on paye les taxes. Manifestement, ils veulent du pognon. Voyant qu’on est trop nombreux pour discuter sereinement, je demande à tout le monde de retourner au camion. Je me retrouve donc tout seul avec les douaniers dans leur petite baraque. Après d’âpres négociations au milieu des fusils mitrailleurs, je réussi à les convaincre de nous laisser passer sans rien payer. Finalement, le chef accepte. Mais il n’est manifestement pas content. Je retourne au camion et dis à Franck de démarrer rapidement. Durant une centaine de kilomètres, nous longeons la voie ferrée qui va à Zouerate, une ville minière dans le nord du pays. Nous avons la chance d’apercevoir le train le plus long du monde. Il a plus de 160 wagons remplis de minerai de fer. Sachant qu’un wagon mesure environ 20 mètres de longueur, on a calculé qu’il devait faire au moins 3 kilomètres de long. La première partie du trajet est la plus sableuse. Franck n’est pas encore très à l’aise sur ce genre de terrain et nous nous ensablons plusieurs fois. Heureusement que le camion de Thomas nous accompagne pour nous sortir de là à chaque fois. Grâce à son 4x4, il peut nous tirer sans difficulté. La nuit tombe, mais cela n’empêche pas notre guide de nous indiquer les bancs de sables au mètre près. Il connaît la piste par cœur. Nous arrivons vers 20 heures dans un petit campement en plein désert où nous passerons la nuit. La lune est presque pleine. On y voit presque comme en plein jour. Nous montons sur la plus haute dune pour contempler le paysage. Le désert est magnifique. Comme il commence à faire frais, nous allumons un petit feu avec le peu de bois que nous trouvons autour du campement. En guise de réveillon du nouvel an, Félix décide d’ouvrir des boîtes de petits pois. Moi, je préfère en ouvrir une de maïs. Avec de la mayonnaise, c’est très bon. Thomas sort du beurre qu’a fait sa mère. Franck et Mathieu s’amusent à faire brûler du gasoil sur le feu comme des gosses. Trop fatigués pour attendre minuit, nous nous couchons à 10 heures. Durant la nuit, j’entends des mauritaniens au loin qui font la fête et rigolent beaucoup.

mercredi 30 décembre 1998

La frontière mauritanienne

Je suis réveillé par le bruit des voitures qui commencent à se préparer au départ. Les militaires marocains nous rendent nos passeports, puis nous attendons que tout le monde soit prêt au départ. A partir de cet endroit, le goudron s’arrête. La route est en très mauvais état. Il y a quelque partie sableuse dont une passe où un grand nombre de véhicules, nous y compris, reste ensablé et attend l’aide de véhicules plus chanceux ou plus téméraires pour l’aider à s’en sortir. Heureusement, il y a dans le convoi un camion allemand 4x4 qui peut nous tirer facilement. Certains, plus futés, arrivent à contourner l’obstacle. A quelques kilomètres plus loin, en plein désert, il y a la police militaire mauritanienne. La file d’attente est longue et il faut prendre son mal en patiente pour pouvoir enfin passer. J’en profite pour prendre quelques photos du convoi et me fais engueuler par un militaire qui me menace de me confisquer mon appareil. Je m’exécute sans discuter. J’aurai du y penser avant. Nous sommes en pleine zone militaire. Lorsqu’on arrive enfin au barrage militaire, on dépose nos passeports et la carte grise du camion que l’on récupérera plus tard à Nouâdhibou. Juste derrière la guérite des douaniers, il faut passer une dune de sable difficile à franchir. Il y a eu pas mal de voitures qui ont souffert à cet endroit. Heureusement, Franck passe assez facilement. J’étais inquiet car jusqu’à présent, on ne peut pas dire qu’il maîtrise bien la conduite sur sable. C’est rassurant pour la suite. Nous reprenons la piste bien cassante. On croit deviner un ancien goudron. Nous faisons deux haltes durant le trajet pour rassembler les véhicules. Nos deux camions ferment le convoi. Les paysages sont magnifiques. Les jeunes du convoi s’éclatent en faisant la course. On arrive enfin au poste de douane, à 22 km au nord de Nouâdhibou, où il faut remplir soi-même les fiches d’état civil et un certificat de devises. Durant l’attente pour passer à la fouille, Arturo, un type du coin, nous propose de nous accompagner dans un camping en plein centre ville, de nous faire rencontrer un guide potentiel et de nous aider dans les démarches administratives. Nous acceptons. Grâce à lui nous passons la douane sans difficulté. On nous rend nos passeports. Félix parvient à récupérer difficilement le sien, moyennant bakchich. Cela, pense-t-il, nous évitera des tracasseries et nous fera gagner une bonne journée. Ils sont durs entre africains. Arrivés à Nouâdhibou, nous changeons de l’argent malgré l’heure tardive. Franck en profite pour téléphoner à sa copine. Il ne peut décidément pas s’en passer. Puis nous partons au camping. C’est un repère de jeunes rastas un peu paumés mais pas méchants. Nous stationnons nos deux camions puis allons dîner au restaurant Babylone. Je déguste une superbe langouste avec du riz. C’est un délice. Avec le guide que nous a présenté Arturo, nous nous mettons d’accord sur les modalités de la traversée du désert. Nous négocions le prix du guide à 1 000 francs pour les deux camions. C’est cher, mais c’est le tarif en vigueur. On peut trouver moins cher, mais c’est risqué. Franck et Félix veulent aller boire une bière. Thomas, le chauffeur allemand du camion 4x4, et moi rentrons nous coucher.

mardi 29 décembre 1998

Le bouchon

Le départ du convoi est annoncé pour 10 heures, mais nous savons qu’il ne part jamais à l’heure. Auparavant, nous retournons au camping pour récupérer les habits de Félix qui y sèchent, puis en ville pour acheter du pain et des boissons. Vers 10 heures, nous nous rallions au convoi qui se forme petit à petit près du barrage de police. Il y a déjà une cinquantaine de véhicules qui attendent. Les douaniers fouillent chaque véhicule et demande le rituel petit cadeau. Nous refusons, ils n’insistent pas. Nous stationnons en attendant que tout le monde passe la douane. L’attente est longue. Les militaires qui accompagnent le convoi prennent les passeports de tout le monde. Finalement, nous ne partons qu’à 15 heures comme nous l’avaient prédit quelques habitués. Le convoi roule plutôt plus vite que nous ne l’imaginions. La route goudronnée est étroite, mais toujours aussi bonne. A certain endroit des bancs de sable ont recouvert la route et il faut les contourner. Nous longeons toujours la mer. Les plages sont superbes mais sûrement minées. Il est strictement interdit de sortir du convoi. Vers 22 heures, nous arrivons enfin au campement dit "le bouchon". Nous trouvons une place à coté de nos amis de voyage pour garer le camion. Les voyageurs sont dans l’ensemble sympas. Il y a beaucoup d’allemands assez bruyants, des suisses, quelques espagnols, des mauritaniens qui font du trafic de Mercedes et bien sur une majorité de français. La nuit est très fraîche. Le pauvre Félix est transi de froid. Pour se réchauffer, il tente de se brancher une bretonne baba cool sans succès. Je demande au groupe de jeunes bretons campant juste à coté de baisser un peu le son du djembé. Y a pas de problème.

lundi 28 décembre 1998

Les démarches administratives

La journée est entièrement consacrée aux papiers et démarches administratives. Nous retrouverons les routards à chaque étape. D’abord, passage au commissariat de police où nous remplissons une fiche d’état civil. Après, nous allons à la sûreté militaire où on remplit une fiche assis sur des bancs d’école. Nous devons fournir deux photos d’identité. Comme nous n’en possédons pas, nous allons en ville pour se faire tirer le portrait. Le fond arrière est noir, ce qui fait qu’on voit à peine Félix. Heureusement qu’il a des dents et des yeux blancs. Après, passage à la douane à l’entrée de la ville. Seul le chauffeur doit y être présent. Les douaniers ennuient Franck car le camion est au nom de sa société. Ils veulent refuser notre passage dans le convoi, mais finalement cela s’arrange. Nous devons faire quelques courses pour le voyage. Pour cela, je dois changer un peu d’argent à la banque. Là, j’y retrouve Yvan et Georges qui me font gagner une heure d’attente en me permettant de passer avec eux. Je change les dollars que Laurent a donné à Félix. Nous retrouvons Félix et Franck qui m’ont attendu plus de deux heures près du marché. Nous allons acheter de l’eau, des fruits, du riz et des conserves. Puis nous allons pique-niquer avec Yvan et Georges à l’extérieur de la ville, prés de l’endroit où nous avons dormi cette nuit. Ils sortent une boite de confit de canard que nous accompagnons de spaghetti. C’est succulent. Vive le ramadan. Au moment du café, deux autres voyageurs, Xavier et Line, sa fille, nous rejoignent. Au bord de la route, un camion chargé à bloc de cailloux explose un pneu. La détonation était tellement forte que j’ai cru qu’il s’agissait d’une mine. Dans la soirée, nous passons au camping pour demander la permission de prendre une douche et laver quelques vêtements. Le filet de la douche est un pipi de chat, mais cela fait du bien quand même. Le soir, nous retrouvons Yvan et Georges à leur hôtel pour aller dîner ensemble. Xavier et Line nous accompagnent aussi. Nous mangeons un plat de poisson pour 10 francs seulement. Franck et Félix s’éclipsent pour aller soi-disant faire des affaires. Je reste avec les autres qui sont très sympathiques. Je retrouverai mes compagnons de voyage plus tard au camion. Nous allons dormir au même endroit que la veille.

dimanche 27 décembre 1998

Dakhla

A mon réveil, je vais me promener dans le village de pêcheurs et prendre quelques photos. Les baraques sont faites de bric et de broc. Quelques barques de pêcheurs sont posées sur la plage. Le village est désert. Nous reprenons la route qui devient monotone. C’est toujours un peu le même type de paysage. Désert, falaises, mer et ciel bleu. Franck veut se baigner mais nous ne trouvons aucun accès à la plage. De toute manière, je pense qu’elle doit être beaucoup trop froide à mon goût. Nous faisons une sieste au bord de la falaise où quelques pêcheurs viennent discuter avec nous. L’un d’eux, un ancien militaire parlant très bien le français, vient nous demander de lui soigner la paume de sa main blessée par un poulpe. Je désinfecte la plaie et lui mets un pansement. Il est ravi. Je lui offre une cigarette et nous repartons. Nous sommes arrêtés par plusieurs barrages de police qui nous font remplir des fiches de renseignements dont les prénoms de la mère et du père (marrant). C’est à l’un de ces barrages que nous faisons la connaissance de Georges et Yvan, deux français qui font la traversée en voiture. Dakhla est une presqu’île complètement désertique où il ne pleut pas depuis plusieurs années. Les seules activités sont la pêche et la garnison militaire. La ville est en pleine construction. Pour des raisons politiques, le Maroc investi énormément dans cette région. Il existe un camping rempli de routards plus ou moins farfelus. Il y a des vieilles camionnettes bariolées et des 4x4 flambant neufs. Nous préférons camper à l’extérieur pour être plus tranquille. Nous mangeons dans un restaurant plutôt pas mal. Des brochettes de poissons pour moi, un couscous pour Franck et du riz pour Félix. Franck fait le difficile pour manger son plat, c’est Félix qui le finit. Nous achetons des piles pour la torche. Elle ne marche toujours pas. En fait, c’est la lampe qui est grillée. Nous allons dormir à deux kilomètres du camping prés d’une petite crique. Il parait que j’ai ronflé toute la nuit. Enfin, c’est Félix qui dit ça.

samedi 26 décembre 1998

Laâyoune

Nous profitons de la présence d’un jardinier qui entretien les espaces verts pour remplir nos bidons d’eau. Franck et Félix vont prendre un café. Pendant ce temps j’en profite pour faire un tour dans la ville. Tout est organisé autour du tourisme. Je change de l’argent dans une banque de la Société Générale marocaine. Je visite un centre commercial touristique vide et sans intérêt. Agadir est à la porte du désert. C’est maintenant que commence la vraie traversée. La route jusqu’à Tan-Tan n’a pas beaucoup d’intérêt. L’ambiance dans le camion est un peu glaciale suite à la conversation d’hier soir. Après Tan-Tan, la route longe de superbes falaises hautes d’au moins trente mètres jusqu’à Tarfaya. Nous nous arrêtons pour prendre quelques photos. Félix a peur du vide et ne veut pas s’approcher du gouffre. Il y a de nombreuses épaves de bateau échouées sur les rochers. On peut apercevoir plusieurs petites cabanes de pécheurs à la ligne au bord des falaises. Nous voyons nos premiers dromadaires. Nous arrivons à Laâyoune la nuit. La ville a l’air accueillante. Nous mangeons de très bonnes pizzas. Un groupe d’enfants nous harcèle puis lassé s’en va. N’ayant plus de tabac à rouler, j’achète des cigarettes à un prix défiant tout concurrence. Après avoir dîné, nous décidons de trouver un endroit plus calme pour pouvoir dormir dans le camion. On fait le plein dans une station à la sortie de la ville. L’ex-Sahara Occidental étant occupé totalement par les marocains depuis 1979, ces derniers ont décidé d’en faire une zone franche pour pousser les gens à venir s’installer dans cette région plutôt inhospitalière. On achète donc le gasoil à 1,70 francs le litre. Nous continuons la route vers la mer. Laâyoune Port est une zone industrielle dont le port tout illuminé est en pleine activité. Nous tentons de poursuivre car l’endroit n’est pas vraiment propice au camping. Finalement, nous trouvons un petit village de pêcheur à quelques kilomètres de la route. Après avoir demandé l’autorisation, nous dormons là avec les vagues en bruit de fond.

vendredi 25 décembre 1998

Agadir

Après une bonne nuit et un bon petit déjeuner, nous préparons le départ pour une longue étape. Nous apercevons une fuite d’huile sous le camion. Franck et Félix me font croire que la boite de vitesse est cassée et qu’il faudra rester ici quelque jour pour la réparer. En fait, la fuite provenait d’un vérin qu’on transporte dans la benne et qu’on n’avait couché. La route à travers la montagne est très belle. Des paysages lunaires et beaucoup de culture dans les vallées. Nous nous arrêtons chez un marchand d’huile d’olive qui nous montre son pressoir. On en profite pour lui acheter des olives vertes et noires et des dates. Nous traversons Marrakech sans nous arrêter car nous voulons atteindre Agadir ce soir. Agadir est une ville très touristique de constructions modernes. Comme elle a été complètement reconstruite dans les années 60 à cause d’un tremblement de terre, elle a peu d’intérêt. Nous nous promenons le long de la plage bourrée de touristes européens et de restaurants chics. Nous dînons dans l’un d’eux. La bière en pression coûte 30 francs la chope! Plus cher qu’à Paris. J’ai le droit à une discussion conflictuelle avec Franck et Félix sur les comportements de chacun. Je mets ça sur le compte de la fatigue. Je leur explique que je n’ai pas tout à fait la même conception du voyage qu’eux. Mon but n’est pas uniquement d’acheminer un camion au Burkina mais aussi de prendre mon temps et de visiter tranquillement les pays traversés. Crevé, je vais dormir dans le camion qui est garé sur le parking de la plage. Félix et Franck vont passer la fin de la soirée dans une boîte de nuit avec putes et alcool. On n’est décidément pas du même monde.

jeudi 24 décembre 1998

Le réveillon de Noël à Azrou

Après les émotions de ces derniers jours, nous décidons de prendre notre temps et de faire une petite grâce matinée. Cela faisait trois nuits que nous avions mal dormi dans le camion. Nous ne trouvons pas de bistrots qui servent un petit déjeuner à cause du ramadan. Félix et Franck vont téléphoner en ville pour prendre des nouvelles de leur famille. Au moment de partir, Franck tend un billet de 10 dirhams au patron de la station pour qu’il le remette au gardien qui a surveillé le camion durant toute la nuit. Il refuse le billet et réclame royalement 40 dirhams. Je dis à Franck de s’en aller car il nous prend pour des cons. Mais ce dernier n’est pas content du tout. Il nous court derrière et arrive à monter sur le marchepied du coté chauffeur. Il insulte Franck en exigeant son argent. On s’arrête un peu plus loin pour tenter de le calmer. Finalement, comme il y a un flic à proximité, il finit par accepter notre billet et s’en va en râlant. Ca a failli être chaud. Je ne sais pas pourquoi mais Franck a le don d’énerver. On choisit de changer d’itinéraire. On va passer par la montagne plutôt que de longer la mer. La route semble plus jolie. On passe Rabat, sans intérêt. On s’arrête à Khermisset pour déjeuner dans un restaurant bourré de touristes espagnols. Il leur faut une heure et demie pour nous servir une simple omelette. En plus, c’est cher. Franck ne se sent pas très bien. Il a un petit malaise. Il va s’allonger un peu dans le camion. En attendant nos plats, j’écris mes notes. Félix dort assis sur la banquette. Après avoir enfin mangé, nous retournons au camion où nous retrouvons Franck mal en point. Il a vomi à l’arrière du camion. Je lui donne un cachet d’Imossel, puis nous repartons. Au bout de quelques kilomètres, il va déjà mieux. Il s’agissait très certainement d’une indigestion. Nous arrivons à Meknes. Ca grouille de monde, surtout d’hommes. Pas très gai l’ambiance. Nous hésitons à visiter la ville et à laisser le camion sans surveillance. Finalement, nous poursuivons notre route et décidons d’abandonner l’idée de passer par Fez. Nous prenons la route du sud. Nous avons droit à de magnifiques paysages dont un superbe panorama avec le coucher du soleil. Pour le réveillon de Noël, Franck veut nous offrir la nuit dans un bon hôtel. Félix et moi ne sommes pas très emballés par l’idée mais si ça lui fait plaisir… A l’entrée d’Azrou, il y a un grand hôtel un peu ringard qui parait vide. Franck, un peu naïf, est persuadé que des touristes vont arriver dans la soirée pour faire la fête. Il est très cher mais il plaît à Franck. L’hôtesse d’accueil nous fait visiter une chambre spacieuse et propre, mais froide. Il n’y a pas d’eau chaude mais l’hôtesse nous promet qu’elle va s’en occuper et qu’il ne faudra patienter que quelques minutes. Nous nous allongeons sur les lits en attendant que l’eau chaude arrive. J’en profite pour lire le Guide du Routard qui indique un hôtel beaucoup plus sympa à quelques kilomètres plus loin. Au bout d’une heure, l’eau chaude n’étant toujours pas là, Franck, sans doute vexé d’avoir pris sa décision unilatérale un peu trop vite, décide de quitter cet hôtel et d’aller dans celui du Routard. Le gérant de l’hôtel, furieux, tente de nous convaincre à rester. Nous lui faisons comprendre que c’est trop tard. Nous avons bien fait, car l’autre hôtel est vraiment bien plus sympa. Il y a de l’eau chaude, un feu de cheminée dans le restaurant et un vrai menu de Noël avec dinde et bûche au dessert. Nous avons même droit à la retransmission de la messe de minuit avec le pape à la télé.

mercredi 23 décembre 1998

On finit par passer

Hier, Laurent nous a confirmé qu’il avait bien envoyer le faux ordre de mission à Rabat. A 8 heures, nous repassons donc à la douane pour savoir si l’autorisation est arrivée. Mais Rabat ne donne toujours pas signe de vie. En plus, c’est la période du ramadan, ce qui n’arrange rien. Tous les services administratifs tournent au ralenti. Comme je passe voir de temps en temps l’ordonnateur, je lui demande discrètement s’il nous laisserait passer si on équipait notre camion en espèce de camping-car. Il me fait comprendre qu’il pourrait fermer les yeux. Sans perdre de temps, j’en parle aux autres et nous retournons à Ceuta pour déguiser notre camion (un petit bonjour au passage aux douaniers espagnols). Claude-Maurice décide de nous quitter. De toute manière, il ne pouvait pas passer à cause de son passeport et, pour être honnête, son look de saltimbanque nous desservait plus qu’autre chose. Nous le laissons en ville après qu’il nous ait offert un petit déjeuner. Maintenant, nous ne sommes plus que trois mais avec un sérieux espoir de pouvoir enfin passer. Il faut nous débarrasser des pneus qui encombrent la benne. Nous cherchons un marchand en ville qui serait intéressé pour nous les racheter un bon prix. Nous trouvons, dans la zone artisanale, un français qui fait du trafic de pneus. Dans chaque roue des voitures qu’il équipe, il planque deux autres pneus et quatre dans la roue de secours. Il est stupéfait d’apprendre qu’on ait tenté de passer la frontière avec tout notre stock. Il nous dit que les douaniers auraient pu nous saisir notre camion. Le commerce des pneus est, parait-il, strictement interdit au Maroc. Nous nous rendons compte que nous avons échappé sans le savoir à une très grosse galère. Il paraît peu intéressé par nos pneus d’occasion qui, il faut le reconnaître, ne sont pas d’excellente qualité. Nous les déchargeons tous pour qu’il puisse les voir. Finalement, ça ne l’intéresse pas. Il aurait pu le dire avant le déchargement. Il nous prend les meilleurs gratuitement pour soit disant nous dépanner. De toute manière, on n’a pas le choix. Il faut s’en débarrasser si on veut passer. Nous décidons d’aller jeter les autres en décharge. Sur la route, Franck propose de suivre une toupie de béton qui possède des pneus similaires. Arrivé à la centrale béton, le patron nous en offre 50 000 Pts (2 500 francs). Ils en valent beaucoup plus, c’est toujours ça de pris. Nous acceptons leur offre après d’âpres négociations. Nous profitons de leur karcher pour nettoyer l’intérieur de la benne et de l’aménager le mieux possible en semblant de camping-car. Nous posons un plastic et de la moquette sur le sol, puis par dessus des matelas et déplions des sacs de couchage. Nous entreposons les affaires de la croix rouge dans le fond avec nos sacs. Nous conservons tout de même six roues de secours. Nous retirons la bâche et posons un pneu au-dessus de la cabine pour faire plus "camion-raid". Il est 16 heures lorsque nous repartons pour la dernière fois vers la frontière. Sur l’ordre de l’ordonnateur, un douanier marocain vient inspecter le camion pour contrôler s’il a bien été aménagé. Gentiment, il signale au grand chef, que c’est passable mais correct. L’espoir est au maximum. Comme c’est la tombée de la nuit, nous attendons pendant plus d’une heure, mais nous n’en sommes plus à ça prêt, que les douaniers aient fini de manger pour obtenir l’autocollant attestant du contrôle douanier. Finalement, nous obtenons le fameux "sésame ouvre-toi" tant convoité. Félix remercie l’ordonnateur. Nous montons dans le camion et deux cents mètres plus loin, juste devant la dernière barrière, nous sommes arrêtés par deux gendarmes pour un dernier contrôle de nos passeports. Il y a un problème. Les tampons sont datés d’hier. Il faut retourner à la police pour les faire corriger. J’ai bien cru que Félix allait défaillir. Franck y retourne tout seul à pied avec nos passeports. Nous ne voulons pas ramener le camion là-bas. Il met plus d’une demi-heure pour corriger les tampons. L’attente est interminable. Va-t-on finir par passer ? Franck revient enfin avec les passeports corrigés. Contrôle rapide puis ils ouvrent la barrière. On retient notre respiration. Une fois passés, on crie de joie "On les a niqué !" Nous nous arrêtons quelques kilomètres plus loin, pour remettre la bâche et rentrer le pneu posé au-dessus de la cabine. Nous choisissons de prendre la route qui longe l’océan atlantique vers Rabat. La nuit nous empêche de contempler le paysage qui d’après la carte à l’air d’être très joli. Il y a beaucoup de belles villas, sans doute payées avec de l’argent des différents trafics pas trop légaux. Il y a plusieurs barrages routiers, mais dès qu’ils se rendent compte que nous sommes français, ils nous laissent passer avec un grand sourire. Nous arrivons vers 22 heures à Kenitra. Nous trouvons un hôtel un peu misérable mais plutôt sympa. Nous stationnons le camion sur le parking gardé de la station service d’à coté. Le gérant de l’hôtel nous propose d’aller dîner dans le restaurant que tient son fils, quelques mètres plus loin. Nous mangeons de bonnes brochettes pour pas très chères. De retour à l’hôtel, nous apprécions la douche tant convoitée. Cela faisait trois jours qu’on ne s’était pas lavé.

mardi 22 décembre 1998

Le moral à zéro

Vu l’inconfort de la cabine du camion, nous n’avons pas trop de mal à nous lever à 5 heures. Faisant comme si de rien n’était, nous tentons de repasser la frontière en espérant que l’équipe des douaniers aura changé. Un passeur nous propose de nous aider à remplir les formulaires. Nous acceptons pensant qu’il peut faciliter les choses. Il refuse de remplir le formulaire de Félix, sûrement parce qu’il est noir. Ca me choque mais ce n’est pas l’endroit pour faire une esclandre. Un douanier demande au chauffeur du camion, donc Franck, de le suivre voir le chef des douaniers. Pas de chance, c’est le petit teigneux d’hier. Il engueule Franck et lui demande de dégager immédiatement. Franck tente le tout pour le tout en lui proposant un bakchich. Ca a failli tourner au drame, le teigneux lui dit que c’est de la corruption de fonctionnaire. On n’insiste pas et faisons demi-tour à Ceuta. Cela fait bien rire les douaniers espagnols, nous moins. Félix, Franck et Claude-Maurice décident d’aller prendre un petit déjeuner en ville. Moi, je préfère rester dans le camion pour essayer dormir un peu. Je n’ai presque pas fermer l’œil de la nuit. Après avoir déjeuné, Félix et Franck vont voir la croix rouge locale pour essayer d’obtenir leur aide. Malheureusement, ils ne peuvent pas faire grand chose pour nous. Mais ils promettent d’en parler à un douanier espagnol qu’ils connaissent. Plus tard, nous téléphonons de nouveau à Marie-Christine qui nous informe que la croix rouge ne fera rien pour nous aider. Ils ne veulent pas prendre de risque. Le moral des troupes est au plus bas. Nous commençons à réfléchir à un éventuel retour. Nous tentons le tout pour le tout. Nous retournons à la douane marocaine pour les informer que nous avons fait le nécessaire auprès de la croix rouge et que tout devrait rentrer dans l’ordre rapidement. L’ordonnateur, le chef des douaniers plutôt sympa, me montre un fax du consulat de Tanger en notre faveur mais ne peut rien pour nous car il a besoin d’un ordre de Rabat, pas du consulat français. Un chef douanier espagnol vient essayer de parlementer avec l’ordonnateur. Il a sûrement été averti de notre problème par la croix rouge de Ceuta. Les douaniers et policiers marocains font semblant de compatir à notre problème, mais nous ne sommes pas dupes, ça ne changera pas grand chose. Tant qu’ils ne recevront pas de fax de Rabat, ils ne nous laisseront pas passer. Comme tous nos espoirs s’estompent, nous décidons de demander à Laurent, le copain de Félix, de faire un faux ordre de mission de la croix rouge et de l’envoyer par fax directement à Rabat. Pour cela, nous lui envoyons par fax un courrier de la croix rouge que nous possédons pour qu’il puisse récupérer l’entête et la signature. Avec Félix, je rédige un courrier d’accompagnement. N’arrivant pas à joindre Laurent, nous en faisons une copie à Fabienne pour qu’elle tente de le joindre et de voir ce qu’elle pouvait faire de son coté. Puis, nous retournons à la douane. Le fax n’est pas encore arrivé. Nous attendons à l’écart dans le camion. Un peu plus tard, un groupe de français arrivent avec un camion bariolé militaire et deux voitures. Ca ne rate pas, les voitures peuvent passer mais pas le camion. Ca n’arrange pas nos affaires mais nous nous sentons moins seul. Nous discutons avec eux. Ceux sont des grenoblois assez sympas mais pas très finauds. Ils veulent aller à Rabat pour chercher les autorisations nécessaires et revenir récupérer le camion. On leur explique que ça va prendre beaucoup plus de temps qu’ils ne l’imaginent. Ils n’arrêtent pas de téléphoner partout avec leur portable. Ca a l’air d’énerver les douaniers. Nous voyons bien quelques camions touristiques passer, mais comme ils sont aménagés en camping-car, ils ont donc le droit de passer. A la tombée de la nuit, nous décidons d’aller discrètement faire viser nos passeports à la police. On se dit que ce sera toujours ça de fait au cas où on arriverait à passer. Un douanier fait remarquer à Claude-Maurice que la date de son passeport est périmée et qu’il ne pourra donc pas passer. Il râle et crie partout "Je suis le roi des cons!". A l’heure qu’il est, le fax n’arrivera sûrement plus ce soir. Nous retournons donc à Ceuta devant l’air hilare des douaniers espagnols. Franck et Claude-Maurice retournent dîner au resto chinois. Félix et moi n’avons pas faim et restons dormir dans le camion. A leur retour, nous partons dormir à notre place habituelle sur le parking de la plage. Claude-Maurice va se coucher dehors malgré le froid.

lundi 21 décembre 1998

Bloqués à Ceuta

Nous profitons du départ matinal des enfants à l’école pour faire nos adieux et reprendre la route. La route qui longe la Costa del Sol est assez jolie. Elle doit être noire de monde durant les mois d’été. Au loin, nous apercevons le rocher de Gibraltar qui se dresse tout seul au bord de la mer. Arrivés à Algeciras, nous trouvons une agence maritime qui nous vend un billet de bateau pour Ceuta. Nous attendons deux heures sur le port car notre camion ne peut pas emprunter les ferries destinés aux voitures à cause de sa hauteur. Franck, en faisant un peu de forcing, parvient enfin à rentrer le camion dans un bateau. La traversée est très agréable et déjà, nous voyons apparaître les côtes marocaines. Le détroit n’est vraiment pas large. Nous mangeons un sandwich et une bière au bar du bateau. Arrivés à Ceuta, nous cherchons une station d’essence pour faire le plein. Ceuta est une zone franche, le gasoil ne coûte que 2,10 francs le litre. Il y a pleins de noirs africains qui nettoient les voitures au bord des plages. La plus part d’entre eux sont des sans papier, coincés là par manque de visas. A partir de maintenant commencent les emmerdements. Vers 16 heures, nous passons la douane espagnole sans aucun problème. Deux cents mètres plus loin, il y a la douane marocaine. Là, les choses se compliquent. Un douanier marocain nous demande d’avancer le plus loin possible. Nous nous exécutons bien que cela nous paraisse un peu bizarre. Bien entendu, le chef sortant de son bureau nous ordonne de faire demi-tour. Il a une gueule de petit teigneux. Il nous dit que, de toute manière, aucun camion ne doit passer par Ceuta et qu’il faut reprendre le bateau et passer par Tanger. Nous avons beau montrer des papiers de la croix rouge et d’Emmaüs, que nous avons obtenu grâce au matériel que nous transportons (frigo et médicaments pour un centre de secours au Burkina), mais rien n’y fait. Ils veulent une autorisation de Rabat pour pouvoir circuler en camion au Maroc. Normalement, nous aurions dû la demander en France mais il faut plus de six mois pour l’obtenir. On a donc fait l’impasse. Nous jouons les pauvres martyrs qui ne savaient pas. Malgré toutes les discussions, nous nous rendons bien compte que nous ne passerons pas tant que nous n’obtiendrons pas cette autorisation. Nous retournons donc à Ceuta pour téléphoner au consulat de France de Tanger et voir s’ils peuvent intervenir pour nous aider. La personne que j’ai au téléphone me fait tout un laïus quant à notre inconscience de ne pas nous être informé avant notre départ. Pour nous être agréable, il enverra tout de même un fax à la douane pour parler en notre faveur, mais insiste pour dire qu’il ne pourra pas se porter garant de notre chargement. Je le remercie. Plus tard, nous appelons d’un grand hôtel Marie-Christine, un contact de Félix, pour qu’elle intervienne auprès de la croix rouge pour débloquer la situation. Elle nous promet de faire le maximum au plus vite. L’espoir renaît. Nous allons manger dans un restaurant chinois. Nous allons dormir dans le camion sur un parking prés de la plage et non loin de la frontière. Nous rencontrons des touristes allemands qui préfèrent dormir là et passer la frontière tôt le matin. Il parait que les marocains sont moins chiants à cette heure. Pas con. Nous essaierons de passer comme eux. Nous dormons serrés à quatre dans le camion. Le confort est rudimentaire et en plus, Félix ronfle vraiment fort.

dimanche 20 décembre 1998

Déjeuner sur la plage

Ce matin, Grosloup et Félix plantent un arbre dans le jardin pendant que je tente de réparer sans succès un vieil autoradio de Félix. Les parents Baille invitent tout le monde à déjeuner au bord de la mer. Nous montons à onze dans la voiture de Grosloup. Le restaurant qui est spécialisé dans les plats à base de riz. C’est un peu long car il y a du monde, mais c’est très bon. Il fait beau et presque chaud. Nous faisons une promenade digestive sur la plage. Les enfants (Hugo, Anne et Paul) sont adorables quoiqu’un peu turbulents. De retour à la maison, je joue au scrabble avec Frédéric. Je gagne et il n’a pas l’air très content. Serait-il mauvais joueur ? Pour le dîner, Claude-Maurice a décidé de nous faire un poulet à la basquaise. Mais après le festin qu’on s’est fait à midi, personne n’a faim. Pour ne pas le vexer, on se force tout de même à manger.

samedi 19 décembre 1998

Une journée à Malaga

Comme nous ne savons pas si les véhicules utilitaires ont le droit de rouler le week-end en Espagne, nous décidons de rester une journée de plus à Malaga pour éviter les problèmes avec les flics. La nouvelle maison de Grosloup est très spacieuse avec une piscine. Il projette d’aménager le sous-sol pour y faire son atelier de lutherie. Vers 11 heures, Félix, Frank et moi descendons en ville en bus pour se renseigner sur les horaires et tarifs des bateaux qui vont à Melilla (enclave espagnole en territoire marocain). Dans le bus les gens n’arrêtent pas de papoter. Ca change de l’ambiance morbide du métro parisien. La traversée de la méditerranée par Malaga ne s’avère pas intéressante. Chère et longue. Il vaut mieux passer par Gibraltar. Nous prenons un pot sur le port. Passage obligé à la poste pour que Félix et Franck puissent téléphoner à leur famille. Nous achetons des fleurs pour Salou pour la remercier de son accueil. En fin d’après-midi, nous allons faire des courses avec Grosloup et Claude-Maurice. Le soir, nous invitons toute la famille Baille à manger des tapas dans un resto prés de chez eux. Au début, nous sommes seuls dans une immense salle. Il est pourtant plus de 22 heures. Puis les gens arrivent. L’ambiance devient vraiment sympa. Les gens chantent, dansent et rient ensemble. La note est salée mais on s’est bien amusé. A la sortie, Franck s’est fait harponner par un type un peu bourré qui nous tient la jambe avec des histoires grivoises. Au bout d’une demi-heure, Grosloup, inquiet, vient nous chercher. Frédéric nous fait des remontrances à peine voilées. On va se coucher.

vendredi 18 décembre 1998

Arrivée à Malaga

Malgré le réveil matinal des routiers, nous sortons du lit à 9 heures 30. Après un petit déjeuner au bar, nous reprenons la route en direction du sud. Nous traversons de beaux panoramas jusqu’à Madrid. A 30 km au sud de Madrid, nous nous arrêtons dans un fast-food pour manger un hamburger. Pas de chance, il est fermé. Un type complètement drogué nous fait la manche. On s’arrête un peu plus loin prendre un sandwich dans un bar plus chic au bord de la route. C’est fou ce qu’il y a comme magasins de meubles au bord de la route. Nous arrivons à Malaga vers 21 heures. On a bien roulé. Par chance, je retrouve la maison de Grosloup et Salou du premier coup. Les parents de Grosloup, Frédéric et Anne, sont arrivés la veille. Ils n’ont pas beaucoup changé depuis la dernière fois que je les ai vu en Algérie. Ils nous ont préparé un repas copieux aux lentilles. Comme il fait trop froid pour dormir dehors dans le camion, nous passons la nuit à l’intérieur dans une petite chambre et dans le salon.

jeudi 17 décembre 1998

La frontière espagnole

Nous prenons le petit déjeuner avec maman. Je devais aller voir papa à l’hôpital qui se remet doucement de son double pontage. Mais le temps nous faisant défaut, je préfère lui téléphoner pour lui souhaiter un bon rétablissement. Il est dans le cirage mais ça a l’air d’aller. Nous partons de Bordeaux vers 10 heures. Nous retrouvons comme prévu Félix sur la route des Landes. Nous passons la frontière espagnole vers 15 heures. Pas de contrôle. On passe sans s’arrêter. Nous roulons à travers le pays Basque et la Navarre. Les paysages ne sont pas très folichons. Il y a beaucoup de zones industrielles et d’usines polluantes. La nuit tombante, nous nous arrêtons pour dormir dans un hôtel de routiers près d’Aranda, à 170 km au nord de Madrid. Au restaurant, Félix et Franck descendent plusieurs bouteilles de vin rosé. Ils ne sont pas très frais. J’ai l’impression que Franck influence beaucoup Félix. Et pas forcément dans le bon sens. Claude-Maurice et moi appelons Salou au téléphone pour lui confirmer notre arrivée demain à Malaga.

mercredi 16 décembre 1998

Première escale à Bordeaux

Franck se lève aux aurores pour finir le chargement du camion. Nous ne partons que vers 11 heures. La première étape sera Bordeaux. Nous avons prévu de dormir ce soir chez mes parents. A la sortie du village, nous croisons Jean-Luc dans son semi remorque. Nous lui faisons nos adieux et reprenons la route. Franck décide de passer par Paris plutôt que de contourner par la Francilienne. Il s’arrête faire une pause près de la porte d’Ivry pour prendre un café chez une copine dont l’ami tient un bar. Comme le tabac de Claude-Maurice empeste, nous décidons d’un commun accord de ne pas fumer à l’intérieur du camion. Félix propose qu’on s’arrête à Poitiers pour voir Amidou et pour acheter une machine à écrire qu’il veut ramener au Burkina. Vu l’heure tardive à laquelle nous sommes partis, je lui fais comprendre que cette escale va nous retarder et qu’il vaut mieux ne pas s’arrêter. Cela contredit ses plans. Il fait la tête durant tout le trajet. Ça commence mal. Comme le camion ne roule pas à plus de 90 km/h, nous prenons la nationale. Nous perdons pas mal de temps à Orléans dans les bouchons. Pour faire plaisir à Félix, nous décidons finalement de nous arrêter à Poitiers. Amidou et sa femme nous accueillent gentiment. Félix en profite pour acheter deux machines à écrire d’occasion. Nous quittons Poitiers à la tombée de la nuit. J’appelle maman pour la prévenir de notre très probable retard et lui demande de ne pas nous attendre pour dîner. La route paraît interminable. Nous arrivons à Bordeaux vers minuit. Nous dînons sans faire de bruit un super repas que nous avait préparé maman. Laurent, un copain de Félix, passe le chercher pour l’emmener chez lui dans les landes. Nous le récupèrerons sur la route de Bayonne demain.

mardi 15 décembre 1998

Le départ

C’est parti ! Après avoir fermé mon sac à dos, je pars récupérer avec ma voiture Claude-Maurice à la station de métro de Vincennes vers 18 heures et nous partons à Versigny chez les Stammose pour retrouver nos compagnons de voyage, Félix et Franck. Lorsque nous arrivons là-bas, Franck est en train de terminer les préparatifs du camion. Il a rempli la benne de vieux pneus pour les revendre au Burkina. Félix, lui, installe tant bien que mal un autoradio que j’ai acheté la veille. Fabienne a organisé un dîner très sympa avec Jean-Luc, ses parents, Isabelle et Philippe. Nous comptions partir très tôt le lendemain matin, mais comme Franck n’a pas complètement terminé le chargement du camion, nous risquons de repousser le départ de quelques heures.